Arnaud Blomme s'intéresse aux mécanismes moléculaires qui soutiennent la reprogrammation du métabolisme des cellules cancéreuses. Il est actuellement chargé de recherches FNRS dans le laboratoire de signalisation cellulaire du Dr. Close, au sein de l’institut GIGA-ULiège.

Arnaud Blommes 1000-400

Sur quoi portent vos recherches ?

Au cours des dernières décennies, l’identification d’altérations génétiques responsables de la formation de nombreux types de tumeurs a permis d’étoffer significativement l’arsenal de traitements anticancéreux disponibles en proposant des solutions thérapeutiques toujours plus personnalisées, améliorant ainsi sensiblement le pronostic vital de nombreux patients. Cependant, il est maintenant clairement établi que le processus de développement tumoral ne dépend pas uniquement de facteurs génétiques, mais implique également la mise en place par les cellules cancéreuses d’autres processus biologiques leur permettant de s’adapter constamment à leur environnement. Parmi ces processus non-génétiques, la reprogrammation permanente du métabolisme des cellules cancéreuses apparaît comme un élément clé qui contribue aussi bien à l’apparition de mécanismes de résistance aux thérapies qu’à la dissémination de métastases, rendant ces tumeurs primaires plus agressives et difficiles à traiter.

Au cours de mon séjour postdoctoral, j’ai mis en évidence l’importance du métabolisme des lipides dans l’acquisition de mécanismes de résistance thérapeutique des tumeurs solides dépendantes des hormones, telles que les cancers de la prostate et du sein. Plus particulièrement, j’ai démontré, par le biais d’approches non biaisées et de modèles précliniques, que les cellules tumorales résistantes à la thérapie dépendaient fortement de certains types de graisses pour produire leur énergie et se multiplier. De façon intéressante, nous avons également observé que cette reprogrammation métabolique avait un coût élevé pour la cellule et s’accompagnait de l’activation d’une voie de signalisation particulière, la ferroptose, contre laquelle les cellules agressives étaient normalement protégées. Cependant, en utilisant des activateurs pharmacologiques de cette voie de signalisation, nous avons été capables d’exploiter cette vulnérabilité métabolique et d’induire sélectivement la mort des cellules cancéreuses résistantes, réduisant ainsi drastiquement la progression tumorale dans différents modèles précliniques de cancer. Les résultats de mes recherches ont récemment été publiés dans de prestigieuses revues internationales et ont grandement contribués au développement d’un essai clinique de phase 1 dans le cancer de la prostate.

A l’heure actuelle, je continue d’étudier les mécanismes moléculaires qui soutiennent la reprogrammation du métabolisme des cellules cancéreuses. En particulier, je cherche à définir l’impact d’une augmentation de la synthèse protéique, un autre processus fortement perturbé au cours du développement tumoral, sur le maintien du métabolisme tumoral dans le contexte du cancer du poumon. A terme, ce projet permettra d’identifier de nouvelles vulnérabilités métaboliques spécifiques des tumeurs pulmonaires qui, je l’espère, seront exploitables d’un point de vue thérapeutique.

Quel a été votre parcours ?

Après avoir obtenu mon master en biochimie et sciences biologiques, j’ai entrepris une thèse de doctorat en recherche fondamentale dans le domaine de la cancérologie au sein du laboratoire de Recherches sur les Métastases, à l’Université de Liège. Durant ma thèse, je me suis rapidement intéressé à comprendre les mécanismes moléculaires qui permettent aux cellules tumorales d’adapter leur métabolisme énergétique en fonction de leur environnement.

A la suite de mon doctorat, j’ai réalisé un séjour post-doctoral de cinq ans dans le laboratoire du Pr. Leung, au sein du prestigieux institut Beatson du Cancer Research UK, à Glasgow, Ecosse. Durant cette période, j’ai continué à me spécialiser dans la caractérisation du métabolisme tumoral, et plus particulièrement dans l’étude du métabolisme des lipides et de son implication dans la réponse thérapeutique. Ainsi, j’ai mis en évidence une série de nouveaux biomarqueurs associés à la résistance au traitement dans le cancer de la prostate et identifié différentes voies métaboliques dont l’inhibition permet de réduire fortement le développement tumoral et la formation de métastases.

Au printemps 2020, j’ai intégré le laboratoire de signalisation du cancer, dirigé par le Dr. Close, au sein duquel je développe actuellement une nouvelle ligne de recherches visant à étudier les mécanismes moléculaires qui unissent contrôle traductionnel et régulation métabolique dans les cancers du poumon.

Quels sont vos projets pour l'avenir ?

Au cours des prochaines années, j’espère pouvoir établir mon propre laboratoire de recherches pour continuer à développer une thématique de recherche originale au travers de projets ambitieux et d’un réseau de collaborateurs internationaux. En particulier, mes recherches visent à évaluer l’impact de la dérégulation de la synthèse protéique sur la plasticité métabolique des cellules tumorales. A terme, les résultats de ces recherches permettront de mettre en évidence de nouvelles cibles à haut potentiel thérapeutique pour le développement de traitements anticancéreux. En plus d’une position académique, je souhaiterai également continuer à travailler en étroite collaboration avec des équipes de cliniciens, de façon à optimiser le potentiel translationnel de mes résultats et ainsi assurer leur transfert au niveau clinique.

modifié le 15/12/2023

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